Rawdath Demba Diallo, la rolleuse croqueuse d’or

Oui, celle-ci est différente. Complètement. Elle n’a pas d’histoire aboutie à vous raconter. Elle en serait incapable parce qu’elle n’a que 12 ans. Mais, déjà à cet âge, Rawdath Demba Diallo est une merveille de sportive. Et pas que. J’ai découvert Rawdath en écrivant un article-photo sur les 80 champions récompensés au Gala d’Eto’o. J’avais fait des recherches sur chaque sportif primé à cette soirée là pour en choisir quelques uns des plus remarquables. Voilà comment j’ai rencontré cette étoile du Roller ouest-africain. J’ai découvert sa belle histoire : d’abord le Karaté, puis le Roller, ces compétitions, toutes ces médailles d’or qu’elle arrachait juste en roulant…Une croqueuse d’or qui mérite sa place par du travail et une confiance terrible en elle.

Rawdath Demba Diallo veut tout prendre, elle veut tout gagner. J’en ai parlé à la #TeamIrawo. Je leur ai envoyé une note vocale enfiévrée, totalement conquise par ce qu’elle m’inspirait : de la grandeur en ébullition. J’ai vu ce qu’elle faisait actuellement comme performances et j’ai imaginé le futur… Ça brillait trop : j’étais aveuglée ( rires ) . Comme qui dirait, sa carrière commence comme un uppercut. Nous avons sorti la loupe et nous sommes partis à…sa chasse. Opération Irawo Rawdath, P16.

Nous avons rencontré son coach, son père, ses coéquipiers, son charmant frère tout aussi doué, puis le président de la Fédération de Roller Sports du Bénin qui nous a raconté son meilleur souvenir.

On l’a présentée dans 05 épreuves différentes, et elle a eu la médaille d’or pour chaque épreuve. Mieux, elle n’a pas encore l’âge d’être classée dans la catégorie junior. On lui a donc fait un double classement. Sur les athlètes Béninoises et Africaines. On l’a amenée directement au niveau des seniors. Et devant tout le peuple Béninois, à Cotonou, elle a battu toutes les seniors qui ont compéti. C’est là qu’elle a décroché les 05 médailles d’or. Pas de tricherie. Tout le monde l’a vue.  Sur le marathon, des 42 km, elle a battu tout le monde. Rawdath n’a pas cherché à laisser une seule médaille en or à quelqu’un en Afrique de l’Ouest. Après le calcul des pourcentages de performance, c’est elle qui détient le trophée de meilleur athlète fille au Roller Sports, en Afrique de l’Ouest.

Vous n’avez pas idée des trésors sur lesquels le Bénin est assis. Ces Irawos, nous allons les débusquer un à un pour les montrer au monde. Aujourd’hui, voici une jeune Africaine qui a toute sa vie devant elle, qui est prête à affronter n’importe qui, juchée sur ses patins. Quand on rencontre Rawdath Demba Diallo, la seule première question possible c’est : Comment elle fait ? Puissent ses réponses vous surprendre et vous inspirer. Mais surtout…; Dès que vous finissez de lire son histoire, prenez une seconde et rêvez…


Comment as-tu commencé le sport ? 

A cause de papa qui fréquentait un club de sport. Il nous emmenait avec lui les samedis et les dimanches matin. Il nous a inscrits, mon frère et moi, au Karaté. En sortant de l’entrainement, on a vu des enfants en train de rouler. C’était un soir vers 17h. On a eu envie de faire pareil et on a demandé à Papa de nous inscrire. J’avais 10 ans.

Quel est ton rêve ? 

Mon rêve c’est de réussir dans le Roller. Devenir la championne du monde en Roller. Personne ne doit me battre : junior comme sénior. Mon prochain défi c’est de ramener pour le Bénin la médaille d’or aux Jeux Olympiques de Jeunesse de 2018.

Que devraient faire les autorités pour t’aider à réaliser ce rêve ?

Pour nous aider, elles doivent nous donner les moyens pour voyager, participer à des stages qui vont nous permettre de renforcer nos techniques, de participer à des compétitions et remporter des médailles. Ils doivent nous soutenir moralement et financièrement. Le soutien moral pour moi c’est : de me remercier à chaque fois que je remporte des médailles pour le Bénin, de faire quelque chose ou me donner quelque chose. Ça va m’encourager à faire plus. J’aime le Bénin mais il n’y a pas des trucs pour me permettre d’avancer dans le Roller.

Qu’est-ce que ça fait de remporter sa première médaille d’or ?

C’était mon premier championnat de roller, en 2013 : vitesse, endurance et slalom. J’ai eu deux médailles d’or pour la vitesse et l’endurance, et une médaille de bronze pour le slalom. Quand j’ai reçu la médaille, j’étais vraiment contente. Je ne pensais pas que je pouvais remporter une médaille d’or. Parce que c’était la premiere fois que je participais à une compétition.

Que disent tes camarades de classe de ta carrière de Rolleuse ?

Quand je me blesse en travaillant, ils m’embêtent avec : “ Chaque fois, tu viens toujours à l’école avec des blessures”. Parfois, ça m’énerve. Ils disent que j’ai trop de chance, que je gagne beaucoup de médailles. Oui, j’ai la chance d’avoir commencé le Roller très tôt. Je leur réponds : “ Vous pouvez le faire aussi”. Mais un seul parmi eux s’est inscrit en Roller. Ils ont peur de se blesser.

Je suis habituée à me blesser. Mes chevilles sont pleines de blessures. Cliquez pour tweeter

Je suis habituée à me blesser. Mes chevilles sont pleines de blessures. Je ne les écoute pas. Est-ce que c’est leur peau qui est blessée ? C’est ma peau, non ? On me dit de toujours faire attention à ne pas blesser. Aux entrainements, quand on fait la route Tori-Akassato et sur la route, les gens nous insultent. Qu’on va tomber sur la route, se blesser et mourir pour rien. D’autres nous encouragent, d’autres nous rabaissent.

Quelle est ta différence avec tous les autres jeunes champions du monde entier, qui ont souvent le même parcours que toi ?

Eux, ils se concentrent sur une seule discipline. Ils se concentrent sur la seule chose qu’ils savent faire. Moi, je fais beaucoup de choses.

Comment gères-tu la rivalité ? Et si tu rencontres quelqu’un de plus fort que toi ?

Si je rencontre quelqu’un qui peut me battre, je vais d’abord laisser la personne. Après, je vais aller m’entraîner et revenir la voir. Je vais la défier. Il y a une fille qui a commencé le Roller avant moi. Quand je l’ai rejointe dans ce monde, elle a vu que je travaille bien mais elle n’aime pas ça. Quand je la salue, elle ne me répond pas. Parfois aux entrainements, elle me cogne ou m’insulte. Elle veut prendre la première place et ça me force à travailler encore plus. Elle n’a qu’à faire tout ce qu’elle veut.  Moi, je sais que je vais la battre.

Quelle est ta meilleure course ?

C’est le championnat ouest-africain de Roller qu’on a organisé au Bénin, qui a regroupé 10 pays. Ça m’a appris que j’avais du niveau. Il y avait le 100m, le 300m, 500m, 15km et 42km. On a fait des matchs de poule pour aller en finale. Sur les 100m, j’avais peur de la Sénégalaise qui m’avait battue, à l’Africa Game, au Sénégal. On s’est retrouvées en finale. On a fait de la vitesse. Vers la fin, elle était juste à côté de moi, sur la même ligne. Et j’ai tout fait jusqu’à la dépasser. Je lui ai dicté ma loi et j’étais vraiment contente. J’ai réussi à remporter les 05 médailles d’or et j’ai reçu le trophée du meilleur athlète fille de l’Afrique de l’Ouest. C’est là qu’on m’a offert de nouvelles chaussures pour m’entrainer.

Tu penses que ton âge est un handicap ?

Non, c’est une chance pour moi d’être aussi jeune, d’avoir commencé aussi vite le Roller, de pouvoir gagner plusieurs médailles et d’être championne d’Afrique de l’Ouest.

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Qui te booste le plus ?

Mon père. Il me demande de bien manger pour avoir de la force, d’aller au entraînements les week-ends, de soigner mes plaies. Les Samedi matin, je dois travailler au Roller. A 10h, le maître d’etudes est déjà là. On finit à midi. A 14h, le maitre de Maths est là aussi. On finit à 16h. A 16h, je dois revenir au Stade. Même chose le dimanche avec l’école coranique en plus. Il tient à ce que j’aie beaucoup de capacités à faire beaucoup de choses. Les premiers patins de vitesse que j’ai eu, c’est lui qui m’a acheté ça. C’est mon meilleur soutien. Puis, il y a mon coach qui m’a beaucoup aidé à gagner.

Cette furieuse envie de gagner, tu l’as partout ? 

Oui. Surtout à l’école. Mais j’étais première au roller avant de devenir première en classe. Je ne travaillais pas vraiment à l’école avant. L’amour du Roller m’a amenée à mieux travailler à l’école. Je fais partie des 3 premiers de ma classe et je suis première en Maths-Physique.

L’amour du Roller m’a amenée à mieux travailler à l’école Cliquez pour tweeter

Si tu aimes à ce point gagner, pourquoi ne pas avoir continué le Karaté ? Pourquoi le Roller ?

Le Karaté m’aide à contrôler ma colère. J’ai aimé le Roller à cause de la vitesse. J’aime courir avec des patins.  J’aime toutes les épreuves de vitesses.

Qu’est-ce que le Roller a changé dans ta vie, à part cela ?

Tout le monde me connaît, même des gens que je connais pas. ( rires ) A l’école, les maitres et les professeurs me parlent, me félicitent pour mes trophées. Ensuite, le Roller m’a permis de mieux me concentrer, d’être moins agitée et surtout de mieux travailler à l’école.

Le Roller m’a permis de mieux me concentrer Cliquez pour tweeter

Pour faire une course, tu dois te concentrer et courir. Si tu es distrait, tu ne peux pas le faire. C’est ça que je fais sur mes études aussi. Je me concentre sur ce que je fais, pour mieux assimiler les choses et travailler. Le Roller m’a aussi permis d’avoir une condition physique . Je cours pendant un long moment sans me fatiguer. Ça m’aide au Karaté aussi parce que mon adversaire se fatigue plus vite. Et c’est toujours moi qui gagne.

Que dis-tu à quelqu’un qui vient de commencer le Roller ?

De patienter et s’il a un rêve, de tout faire pour le réaliser. Quand j’ai commencé le Roller, j’avais peur de tomber mais aujourd’hui, j’ai la force. Je n’ai plus peur de tomber. Je vais lui dire de ne pas avoir peur de tomber, mais de foncer. Qu’il y arrivera.

Je vais lui dire de ne pas avoir peur de tomber, mais de foncer. Cliquez pour tweeter

Et à quelqu’un qui a envie de s’en sortir en général ? Comment font les génies ?

Les génies ne dorment pas. Il faut mieux travailler dans son domaine, pour être plus fort et être meilleur.

Quel est ton principal défaut en tant que sportif ?

Après les exercices de condition physique au Karaté, j’ai des douleurs sur les cuisses et partout. Parfois, à l’entrainement, je n’arrive pas à travailler au Roller. Il y a des jours où j’ai envie de travailler et des jours où je n’aime pas travailler.

Alors, faire du roller ton métier ou juste une passion ?

Je veux faire du roller professionnel. Je veux m’intéresser aux autres disciplines du roller : le saut, le slalom. Je veux devenir une grande entraîneuse de Roller, diriger une grande équipe de sportifs de haut-niveau, une grande fédération, voir beaucoup de gens s’inscrire en Roller et leur raconter mon histoire.

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