Entre culture cinéma anémiée et préjugés liés aux métiers de l’audiovisuel avec une industrie cinématographique boiteuse, un souffle nouveau tend à revigorer la face et la place du cinéma sur les terres de Béhanzin.
Après environ trente années de black-out des salles de cinéma au Bénin, les béninois se sont vus bénis (sans jeux de mots) par l’avènement du Canal Olympia de Wologuèdè. Dans cet élan qui se veut salvateur de la culture cinématographique, une nouvelle initiative prend forme. Après nous avoir habitué à consommer plus de films, il est temps de se pencher de l’autre côté de la balance : celle de l’offre.
D’où des formations au métier d’acteur
Depuis la fin de l’année dernière, le groupe Canal+ international a décidé de lancer des formations pour découvrir et construire des talents africains dans l’univers du cinéma. Faut dire que le continent africain est devenu une cible de plus en plus privilégiée par la multinationale. Non seulement ils veulent offrir le maximum de produits cinématographiques mais aussi rendre beaucoup plus adapté le contenu proposé. Alors quoi de mieux que de former aux rôles d’acteurs, les pépites qui se trouvent sur le continent afin d’en faire de véritables lingots d’or ?
« Nos programmes sont de plus en plus africanisés. C’est une recette gagnante sur le continent. Il faut que les gens se reconnaissent à la télé. Pour se reconnaitre, il faut que des personnes locales puissent jouer le rôle pour qu’après, vous, vous puissiez vous identifier et vous abonner ». Grace Loubassou, Responsables des relations institutionnelles chez Canal + international.
Plus de 100 postulants ; 10 sélectionnés et 1 challenge
En gros, ceci résume le processus de la formation. Veuillez contactez Canal + pour plus d’informations.
Bon, il faut que j’aie l’air sérieux sur cet article. Je vais devoir lever le rideau sur les informations. Pour faire un peu complet, plus d’une centaine d’individus ont répondu à une offre de formation au métier d’acteur publiée par canal + auprès de ses réseaux partenaires. Faut dire que ce fut une promotion de proximité. Pas de panneaux géants pour annoncer la chose. Les réseaux sociaux et les partenaires de canal + ont fait l’affaire. Et le résultat fut quand même gracieux.
Mais au final, il n’y aura que 10 candidats sélectionnés après une audition évaluée par un Jury composé de trois personnes : le producteur, réalisateur et acteur d’origine béninoise Sylvestre Amoussou et ses deux assistants.
Un challenge énorme pour cette équipe de trois, qui a dû inculquer les bases de l’actorat aux 10 candidats sélectionnés en à peine une semaine. Soit du 4 au 8 Février 2019.
Du coup, 1 semaine, était-ce vraiment suffisant ?
La question capable de remettre en cause la pertinence de cette initiative.
Pour ce qu’il en est, le formateur Sylvestre Amoussou, récompensé Etalon d’argent du Yennenga au FESPACO (Festival Panafricain du Cinéma de la télévision de Ouagadougou) pour son film « Orage africain » en 2017, n’hésite pas à se prononcer en ces termes :
« On ne forme pas un acteur en une semaine. Mais je me retrouvais face à des jeunes pleins de volonté et de pugnacité. J’ai donné le b-a-ba de façon très intensive. Le reste n’est qu’une question de training et de suivi ».
« Cette formation m’a fait voir la partie cachée de l’iceberg. Ma perception du cinéma était bien loin de ce que j’ai pu découvrir pendant cette semaine de formation. L’art de la diction, la gestion des émotions, s’approprier un personnage, autant de choses que nous avons pu apprendre en une semaine. C’était une opportunité incroyable. A l’heure actuelle je suis en ébullition. Je suis capable de pleurer sur commande. Mets-moi sur scène et je pleure sans problème. Puisque j’ai appris qu’il y avait des phrases clés, des déclencheurs pour stimuler les émotions ». Fridaousse Iffabi, participant et primé de la formation à l’actorat.
Une semaine sans doute, mais les réalités du monde du cinéma se sont ouvertes plus que jamais à ces jeunes acteurs.
So, Next Step !
On ne parle pas du cinéma dans notre pays. C’est une industrie à part entière. Elle génère des emplois… Le cinéma permet de vendre un pays, mettre en valeur sa culture, sa géographie, développer le tourisme. Sylvestre Amoussou
Je me suis rendu compte que la jeunesse béninoise qui a envie de se lancer dans l’actorat, n’a aucune culture cinématographique et c’est grave. Parce que j’ai l’impression qu’au pays ici, être acteur c’est s’amuser. C’est un métier avant tout. Sylvestre Amoussou.
Cette initiative de Canal+ international en collaboration avec Canal+ Bénin s’inscrit aussi dans la correction de ces dures réalités qui caractérisent le pays. Canal+ s’est engagé à suivre, coacher et offrir des opportunités à ces jeunes acteurs prometteurs. Mais la balle n’est pas juste dans leur camp. Puisque ces dix talents entendent bien redessiner l’architecture cinématographique du pays.