L’E.P Mongo 2, c’est par ici que ça se passe…
L’année 2018 débute assez timidement côté rap camerounais, probablement parce que les frangins sont encore en studio, nous concoctant de fins mets lyricaux* et mélodieux. N’empêche, il y a quelques semaines le rap camerounais a vu débarquer un de ses acteurs en pleine croissance : Maxtor et son E.P Mongo 2. Il est probablement plus connu dans le milieu du rap que par le public. Cela n’entache en rien son potentiel. Découvrons l’E.P Mongo 2 de Maxtor.
Pour la petite histoire…
Il débarque officiellement sur la scène musicale en 2015, avec sa chanson « Bonbon alcoolisé », dans laquelle il sample joliment le sketch « La fille du bar » du regretté humoriste et comédien Jean Michel Kankan.
Le 01 février 2016, il poursuit sa route en sortant son premier projet, l’E.P Mongo 1 en écoute ici, un condensé de six titres qu’il a recouvert d’un ton de grand-frère du style de Pascal (le grand-frère) ; d’une vibe hard-core, celle qui le caractérise d’emblée, tout cela dans un fond introspectif intense doublée d’une attitude egotrip. Tout cela résume assez le rap, particulièrement celui du pays.
Maxtor, « Mongo 2 », le chemin se poursuit
Cet E.P sorti le 20 janvier 2018, c’est le tout premier projet de Maxtor. Ce qu’on peut remarquer d’emblée c’est l’aspect très abouti du disque. Il a continué dans des productions similaires à « Mongo 1 », mais avec plus de profondeur et de maturité, aussi bien dans les textes que les beats.
Des textes équilibrés : une longue introspection, de l’egotrip, de la fête.
A la question « qu’est-ce que t’écoutes quand tu entends le son du grand Maxtor? », la réponse est simple, claire et limpide : « une touche d’espoir sur du djembé (tambour) et un ton hardcore ». Le djembé fait appel ici à la mise en avant des sonorités traditionnelles comme il est désormais de coutume dans la musique urbaine des années 2010. C’est devenu la norme, mieux appliquée par certains que par d’autres, dans certaines chansons mieux que d’autres. Une norme dans laquelle Maxtor démontre un certain maestria.
Au fil des neuf titres de l’EP Mongo 2 on plonge successivement dans une introspection, se pose de nombreuses questions au point de pouvoir verser une larme. Il pense la vie, pense à sa vie, partage certaines de ses craintes et de ses défauts, mais aussi ceux de la jeunesse de manière large.
« J’ai envie de me voir devenir un homme, et me dire que je suis un homme bien. »
« Un homme bien », Maxtor
On oublie vite le « petit voyou » qu’il peut souvent être et que l’on peut percevoir dans ses clips. Il veut être un homme bien, se le demande réellement, expose ses regrets, manifeste ses peurs, se dit finalement que certaines choses difficiles de la vie peuvent arriver à soi-même : il faut relativiser.
« Et si tu n’avais plus de quoi manger, crois-moi tu n’allais plus trier. »
« Et si », Maxtor
C’est ce que l’on peut percevoir sur quatre des huit titres de l’E.P Mongo 2 : « Réellement », « Et si », « Un homme bien », « Motema ».
Puis, la cadence monte, on rentre de ce qui semble être du hardcore. Oui, c’est bien cela ! Même quand il rentre dans une telle ambiance, notamment dans le titre « Coeur d’or » ce n’est pas dans un « boom boom » subversif. C’est calme, élégant, il faut se poser pour écouter et saisir la teneur de chaque mot, de chaque mesure afin de mieux en saisir le sens et la profondeur. On est assez loin de l’inculture qui semble dominer dans le rap camerounais.
Toutefois il vient rappeler à tous qu’il n’en demeure pas moins un milicien du rap hardcore. Avant d’écouter « Le Moule », préparez-vous bien les amis. C’est sans grand danger, mais ne sait jamais. On pourrait le confondre ici au grand Maahlox, rappeur très polémiqué du terroir, ou tout au moins l’y assimiler. Ce que l’on peut dire ici, est que la musique n’est qu’une expression, parfois de ce qui se passe autour de soi et dans la société.
La sensibilité à ce niveau serait de se dire que si cette chanson (« Le Moule ») a des mots aussi « forts » qu’il utilise pour parler de lui, c’est aussi pour parler de la société. Il est franc, cru, quasiment indélicat, le tout en faisant preuve d’une sincérité qui fait se souvenir de la verve de Kery James ou en encore de Nas. L’on se rappelle aisément ici de Victor Hugo, non? Surtout que le bonhomme, comme il le dit, n’a pas peur quand il utilise ses mots.
« Ah ! Quand je vous parle de moi, je vous parle de vous. Comment ne le sentez vous pas ? Ah ! Insensé qui croit que je ne suis pas toi ! »
« Les contemporains », Victor Hugo
Pour le reste, il mixe entre fête et dépeinte d’anecdotes du quotidien, de manière crue et véridique, loin de la demi mesure. Des punchlines encore et encore, qui se regardent toutes de près et frappent tous ceux qui se sentent touchés.
Tout sonne calme
Dans aucune des chansons ça sonne trop fort, pourtant on y retrouve du hardcore. Ne me demandez pas pourquoi. Mais si on me le demande je dirai que derrière cette apparence de loup, Maxtor n’a cessé de nous montrer ou de nous démontrer qu’en réalité il se rapproche plus d’un agneau. Étant lui-même producteur de ses œuvres, et donc celle-ci, on pourrait dire qu’il ne s’agit que de ses choix et de ses préférences.
Mot de fin
En définitive « Mongo 2 » de Maxtor est une belle suite donnée au Volume 1 de l’E.P éponyme. On ne le dira jamais assez, des disques on en a besoin dans ce pays, particulièrement dans le rap. En attendant que d’autres bijoux locaux soient présentés à la consommation du pays et celle d’ailleurs, délectez-vous de « Mongo 2 » ici. Bonne écoute ! ^^